
"La culpabilité, c'est : "Je suis désolé·e, j'ai fait une erreur"
La honte c'est : "Je suis désolé·e, je suis une erreur." "
Brené Brown
La culpabilité et la honte sont souvent associées, parfois même utilisées de façon interchangeable dans une conversation. Pourtant, comme le rappelle dans son TedTalk sur le sujet la chercheuse Brené Brown avec cette formulation particulièrement éloquente, la différence est fondamentale. Elle ajoute ensuite que la honte est hautement corrélée aux addictions, à la dépression, à la violence, à l'agressivité, au suicide et aux troubles du comportement alimentaire, alors que la culpabilité est... inversement corrélée aux éléments de cette liste.
En effet, la culpabilité, c'est un levier pour se remettre en question, donc une capacité d'adaptation. Certes ce n'est pas le plus agréable des sentiments, parce que c'est se remettre en question, mais c'est une capacité d'adaptation. Si on estime avoir fait une erreur, c'est qu'on l'a identifiée, et on peut la réparer. On peut surmonter des obstacles, et surtout construire des relations plus saines. Cette grille de lecture montre comment la honte, par essence, entretien au contraire un sentiment d'impuissance : être quelqu'un d'autre que soi, là comme ça, ça peut sembler compliqué. La honte pousse à se cacher, à voir la vulnérabilité comme dangereuse.
Ce sentiment d'être une erreur, tragiquement, est souvent l'intégration d'un message qui a été envoyé encore et encore aux personnes concernées. C'est le cas, par exemple, pour les victimes de violences intrafamiliales : les personnes qui ont subi des traumatismes répétés, en particulier dans l'enfance, ont souvent honte de qui elles sont en plus d'avoir honte de ce qui leur est arrivé. Il y a aussi une forte dimension sociale, collective : Brené Brown affirme dans son Ted Talk que les femmes y sont bien plus exposées que les hommes, parce que les exigences sont plus fortes, et surtout leurs réussites sont perçues comme le minimum à atteindre plutôt que comme une performance à célébrer. Marie Dasylva, coach spécialiste des discrimination en entreprise, parle du "quatre fois plus"(implicitement, pour obtenir la même chose ou à peine plus, avec les risques de burn out que ça implique) souvent inculqué dans les familles immigrées, et invite, précisément pour ne pas entretenir ce sentiment qu'être regardé·e de haut est légitime ("on ne justifie pas son humanité"), à ne pas discuter plus de 300 secondes par jour avec les personnes racistes, sexistes, LGBTphobes, validistes...
Le sentiment de honte, qui en plus d'être injuste peut être paralysant, destructeur, trouve donc surtout sa source dans... le manque structurel de remise en question de ceux et celles qui le provoquent. Un changement de regard qui gagnerait à être rappelé encore et encore : ce n'est pas, certainement pas, la personne qui a honte qui doit vraiment s'excuser.
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