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  • Photo du rédacteurGrégoire Taconet

Les livres qui m'ont marqué : La relation d'aide et la psychothérapie, de Carl Rogers


Couverture du livre "Counseling and psychotherapy". Une photo portrait de Carl Rogers, la couleur de la couverture est jaune

 Se former pour être thérapeute, c'est ingurgiter beaucoup de connaissances, mais c'est aussi un parcours personnel, avec des découvertes, des surprises, qui vont modifier, parfois radicalement, ce qu'on estime être censé·e faire en tant que thérapeute et/ou la façon la plus pertinente de le faire. Dans cette rubrique, qui devrait comporter si tout va bien un article par mois, je vais parler de livres qui m'ont fait cet effet.


 Je commence avec le choix de la facilité (qui a dit "de la façon la moins originale possible"?) : si je suis rogérien, évidemment que c'est parce que Carl Rogers m'a marqué. D'autres thérapeutes ACP ont eu une expérience forte en lisant Le développement de la personne (du même auteur, vous l'aurez compris), mais je suis psychorigi... euh, méthodique et j'aime bien lire les livres dans l'ordre chronologique, ma rencontre avec Rogers s'est donc faite avec ce livre de 1942.


 J'aimerais pouvoir dire le contraire, mais avant d'ouvrir le livre j'étais plus intrigué qu'enthousiaste. Dans les livres que j'avais déjà parcourus pour le cours de 3ème année de licence de méthodo de l'entretien clinique (dont le partiel avait la réputation d'être noté de façon, disons exigeante), le nom de Rogers revenait souvent, donc ça me paraissait pertinent de lire directement ce qu'il avait écrit, mais d'un autre côté je me demandais bien ce qu'une seule personne avait bien pu accomplir de si novateur dans un contexte où, en substance, une personne en écoute une autre. Et puis qu'est-ce que c'est que cette histoire de non-directivité? C'est bien la peine de se former pendant des années si c'est pour inviter le·a patient·e (ou le·a client·e, semble-t-il) à faire sa thérapie tout·e seul·e.


 Je me posais donc ces questions, et je m'en suis vite posé une autre : si on s'interdit de contredire la personne accompagnée, comment être facteur de changement, en particulier si elle prend une direction ostensiblement néfaste? Pour cette question, je pensais entre autres aux agresseur·se·s dans les relations abusives. Sur ce sujet, j'ai changé de vision dans un sens, puis dans l'autre, je vais probablement en reparler à plusieurs reprises sur ce blog.


 Les réponses à ces questions, le temps de finir le livre, je les ai eues, et elles étaient convaincantes! Estimer que, statut de thérapeute (ou d'accompagnant·e) ou non, on ne sait pas mieux que la personne accompagnée ce qui lui convient profondément, c'est pour le moins novateur! Pas de conseils, pas d'interprétations comme en psychanalyse (qui peuvent provoquer des mouvements défensifs donc... ralentir le processus de changement), en tant qu'étudiant en 3ème année de licence, ça perturbe! Pour autant, non-directivité ne veut pas dire retrait (mais il m'a encore fallu du temps pour comprendre à quel point la présence était importante, et même centrale), l'écoute est active, et ses effets sont brillamment montrés dans la thérapie de huit séances intégralement retranscrites (avec une abondance de notes de bas de pages) à la fin : les relances, qui sont des reformulations qui mettent l'accent sur les émotions (c'est rappelé dans à peu près tous les livres sur l'ACP, et le rappel commence dans celui-là : c'est bien plus difficile à faire correctement, en direct et sur toute la longueur d'une séance, qu'il n'y paraît), permettent d'être observateur·ice de son propre fonctionnement, de percevoir plus clairement ce qui entrave le changement, de sortir du sentiment d'impuissance et d'avoir un regard neuf sur les solutions possibles.


 Un stage en Ehpad plus tard, j'ai constaté que contrairement à ce que je pensais ("c'était très intéressant, mais ça ne me servira absolument à rien pour le stage où je ne vais pas faire d'entretiens cliniques"), "juste" de l'écoute, ça a l'avantage d'être polyvalent (une demande d'échange peut être importante mais n'est pas nécessairement, loin de là, une demande de thérapie), et ça permet de donner de la profondeur aux échanges. Mais j'ai aussi pu constater... que j'étais absolument incapable de le faire de façon satisfaisante! De nombreuses années (je vais soigneusement m'abstenir de dire combien) et cinq ans de formation spécialisée plus tard, heureusement, j'y arrive mieux.



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