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Citation de la semaine 40

  • Photo du rédacteur: Grégoire Taconet
    Grégoire Taconet
  • 2 avr.
  • 3 min de lecture

Photo (portrait) d'Abigail Thorn

"On m'a dit en école de théâtre que pour chaque projet on passe par cinq étapes. C'est génial, c'est tendu, c'est de la merde, je suis une merde, et en fait c'est pas mal." Abigail Thorn


Cette citation est celle d'une dramaturge (prenez impérativement le temps de voir sa pièce The Prince!) et YouTubeuse, mais elle m'a fait penser très très fort (et plus instantanément que je ne voudrais l'admettre!) au sujet si sensible du sentiment de légitimité du ou de la thérapeute.


Bien sûr, comme pour les cinq étapes du deuil d'Elisabeth Kübler-Ross, j'ai envie de préciser "pas forcément toutes et pas forcément dans cet ordre", mais le parallèle reste très parlant. Voilà de façon schématique comment ça pourrait se passer :


"C'est génial" : on a choisi de se former à une approche qui nous enthousiasme. On apprend, on en découvre les subtilités, les richesses (cette approche est encore plus puissante, pleine de sens, qu'elle n'en avait l'air!), on continue d'apprendre, on passe progressivement à la pratique, on se sent capable de faire ce qui il n'y a pas si longtemps paraissait inaccessible. C'est grisant, on se sent à sa place! Et puis démarre la pratique en cabinet.


"C'est tendu" : en théorie, on est formé·e, en tout cas on a le feu vert de notre institut de formation. Mais la sécurité du statut d'étudiant·e n'est plus là. Les personnes vont attendre de nous qu'on règle leur problème, et elles vont nous payer pour ça. Et a priori elles ne vont pas savoir qu'on débute, potentiellement elles ne vont pas connaître notre façon de travailler ce qui inclut les limites de ce qu'on peut apporter, ce qu'on attend d'elles dans la séance. Certes on sait accompagner quand les bonnes conditions sont là, mais maintenant c'est beaucoup moins garanti. Et si on se sent perdu·e? Et si on ne sait pas comment s'ajuster à la demande? Et si on se plante?


"C'est de la merde" : oui, des séances se passent bien, mais d'autres se passent moins bien. Parce que ce qu'on propose ne parle pas à la personne, parce qu'on n'a pas réussi à s'ajuster, parce que parmi l'infinité d'éléments qui font que ça marche ou non la balance n'a pas penché du bon côté. On se refait le film des séances, on grimace en repensant à nos erreurs. C'est sûr, tel·le autre thérapeute, tel·le formateur·ice que j'admire, ne se serait jamais planté·e aussi grossièrement (spoiler : si, tout le monde se plante ou s'est planté). Plus on doute, plus quand on ne sait pas si ça s'est bien passé ou non on s'imagine que ça s'est mal passé. Les personnes qui ne reviennent pas sont forcément déçues. Et si c'était telle phrase que j'ai dite? Et si c'était parce que je n'avais pas assez souri en l'accueillant? Trop souri? Ma tenue vestimentaire? La couleur des murs du cabinet?


"Je suis une merde" : une étape qui peut survenir, qui part d'un bon sentiment (l'envie d'être infaillibl... euh, d'être un·e bon·ne thérapeute), mais que je ne souhaite à personne. C'est le moment où on glisse de l'humilité (à mon sens indispensable pour accompagner correctement) à l'autoflagellation, qui peut au contraire être démobilisatrice, où on glisse de "j'aimerais m'améliorer sur tel ou tel aspect" à "je n'y arriverai jamais, et en plus je suis néfaste pour mes client·e·s". La bonne nouvelle, c'est que ça aussi, ça se travaille en supervision. Et puis, comment vous voulez apprendre à vos client·e·s à être bienveillant·e·s avec eux et elles-mêmes, à laisser de la place au positif, si vous ne commencez pas par le faire vous même?


"En fait c'est pas mal" : on n'est plus dans l'aspect grisant de l'étape "c'est génial" (même si ça booste de le retrouver de temps en temps!), mais on a un regard plus équilibré sur les réussites et les échecs. Oui, l'approche à laquelle on s'est formé·e avec tant d'enthousiasme est riche, puissante, mais ce n'est pas une baguette magique, elle a ses limites. Certes, on a encore beaucoup à découvrir et demain on saura surmonter certaines limites d'aujourd'hui, mais on ne pourra jamais aider tout le monde (une lecture récente rappelle, littérature scientifique à l'appui, qu'aider sept personnes sur dix, c'est déjà énorme... oui, c'est frustrant). Plus qu'à accompagner, écouter, être supervisé·e, se former, encore et encore. Bon voyage!


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Grégoire Taconet Psychopraticien ACP

 

Membre de la FF2P et de l'AFP-ACP

Directeur de mémoire pour ACP France

Cabinet Via Sana

21 avenue Jean Jaurès

69007 Lyon

gtacp@orange.fr

0768457176

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Crédit photos : Donatien Gnackli ZEBI

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